La finalité anthropologique du récit serait de « donner une épaisseur signifiante au passage du temps » dans une sphère culturelle d’expérience de la signification. Mais qu’en est-il du récit, de ses fonctions anthropologiques et littéraires avec l’entrée dans l’ère des réseaux ? [...] L’usage généralisé des nouveaux moyens de communication (ou médiums) que sont les réseaux télévisuels et de l’internet entraîne en effet de profonds changements culturels. Alors que le cinéma tend à faire usage des mêmes moyens narratifs que ceux de la création littéraire, les réseaux télévisuels et internet généralisent l’usage de la forme narrative, par exemple dans le reportage télévisé, dans le storytelling managérial générateur de récit d’entreprise, mais également dans les jeux vidéo. Les nouveaux contenus (ou médias), intimement liés à une logique marchande, engendrent, selon Jean-François Lyotard, une « détemporalisation » et une délocalisation » de l’information qui tendent à couper les liens ethnoculturels permettant jusqu’alors aux peuples de solliciter leur mémoire afin d’organiser l’espace et le temps. L’interactivité permet au récepteur de participer à la création en intervenant, dans une certaine limite, sur les contenus. La relation classique entre créateur individuel et récepteur passif s’en voit ainsi modifiée.
Françoise Dufour, Sylvie André, Le récit. Perspectives anthropologique et littéraire
Françoise Dufour, Sylvie André, Le récit. Perspectives anthropologique et littéraire
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