Peirce est le fondateur du pragmatisme, souvent présenté de façon caricaturale. On lui fait dire que le vrai se réduit à l'utile, la connaissance à l'action, la réalité à ce qu'on en fait. C'est tout le contraire ! Peirce était un philosophe scientifique, un évolutionniste qui se demandait comment peuvent émerger des normes et des valeurs dans un univers soumis au hasard. Pour lui, la vérité est le but idéal de l'enquête scientifique ; la connaissance porte sur un monde réel, fait de possibles et de propriétés stables, sous forme de capacités ou de dispositions naturelles et mentales. Sa métaphysique est celle d'un logicien et d'un savant. [...] Pour Peirce, il y a des propriétés universelles réelles, thèse qu'il emprunte à Duns Scot. Cela m'a conduite à m'intéresser à la métaphysique médiévale. J'y ai découvert un type de philosophie où l'ontologie tutoyait la logique, la théorie de la connaissance et la théorie des signes. On dira : et la théologie ? Certes, elle y est, sans cesse, mais je n'ai jamais conçu la philosophie comme une "servante de la théologie", selon la formule célèbre. Les servantes, de nos jours, se rebiffent !
Claudine Tiercelin
Claudine Tiercelin